Carnet 11: un match fou, une grande première pour Zverev, un Medvedev usé mais présent et un rêve vieux de 10 ans

UN MATCH INCROYABLE... Le quart de finale Alexander Zverev-Carlos Alcaraz (6-1 6-3 6-7 6-4) a été l'une de ces rencontres sorties de nulle part. Pendant 1h30, l'Espagnol s’est en effet fait marcher dessus comme jamais par l'Allemand, qui ne l'avait même pas sorti du match, mais simplement empêché d'y entrer. En étant éblouissant, le grand blond avait mis la Rod Laver Arena en état de sidération, comme Djokovic contre Federer en 2016. Parfois passif et franchement brouillon dans cette quinzaine, "Sacha" avait abordé ce rendez-vous avec un tout autre visage, se montrant monstrueux pour prendre à la gorge Alcaraz, ne lui laisser aucun espace, lui entrer dans le lard. Rarement nous avions vu le vainqueur de Wimbledon pareillement dans ses petits souliers. Et rarement nous avions vu Zverev aussi au-dessus d'un adversaire de ce niveau en Grand Chelem. Tout était juste dans son tennis. Jusqu'au moment de conclure, à 6-1 6-3 5-3, lorsque son bras s'est grippé. "J'ai cogité, je le reconnais", a-t-il admis. La suite a failli tourner à la noyade, au fil d'une empoignade d'un coup devenue extraordinaire, mais le Hambourgeois a trouvé son salut quasiment au moment où on ne l'attendait plus, sur un jeu de service où il a retrouvé sa qualité de retours des premières nonante minutes…

UN CRAQUAGE... Si Alcaraz a soudainement donné l'impression de pouvoir retourner totalement la partie, après avoir commencé à lâcher des coups qui n'étaient jamais sortis de sa raquette (ou alors jamais entrés dans le court) auparavant, c'est d’abord parce qu'à l'heure de servir une première fois pour une place dans le dernier carré, à 6-1 6-4 5-3, Zverev a "chocké". Cela a complètement relancé la partie et également l'ancien no 1 mondial, auteur d'un extraordinaire tie-break. L'Allemand, qui avait brillamment su rester groupé, voire impressionnant, durant 1h30, se trouvant à deux points du gain de la rencontre, a soudainement grimacé. Ses jambes lui faisaient mal, son adversaire aussi. Puis au moment où l'Ibère semblait pouvoir le refroidir, ses si souvent décriées capacités mentales – alors qu'on n’arrive pas à ce niveau sans avoir de grosses ressources... – lui ont permis de forcer à nouveau, d'être plus juste. Lui qui, contrairement à son frère Mischa (étonnamment placide en tribunes), n'avait jamais battu un top-5 en Grand Chelem, tient enfin cette précieuse victoire! On n'ose imaginer ce qu'une défaite aurait provoqué comme dégâts. A contrario, malgré les douleurs, cette victoire peut lui donner des ailes pour se frotter vendredi à un Daniil Medvedev qu'il n'apprécie pas trop.

MEDVEDEV UN PEU LAS MAIS TOUJOURS LÀ… Sacré Daniil Medvedev! Le Russe donne parfois l'impression de plier mais il ne rompt pas. Du moins pas encore, puisqu'il a su trouver l'espace pour franchir le tenace Hubert Hurkacz (7-6 2-6 6-3 5-7 6-4). Tout n'a pas été grandiose (pléonasme), mais le vainqueur de l'US Open 2021 a su forcer la porte avec un extraordinaire jeu de retours à 3-3 dans cette ultime manche. Le voilà en demie, mais non sans avoir balbutié son tennis, notamment en se montrant incapable de porter l'estocade dans un 4e set au cours duquel il avait fait le plus dur. "J'ai eu un gros coup de mou", a-t-il reconnu. Avant d'ajouter: "Je suis détruit"! Sur les rotules et pas impressionnant, "Meddy" a beau être las, il est toujours dans ce tournoi, "plus qu'à" une victoire d'une 3e finale à Melbourne Park. Celle-ci, il faudra qu'il se plie encore en quatre pour aller la chercher.

LE CONTREPIED DE YASTREMSKA… Dayana Yastremska n'a peut-être pas fini de déjouer les pronostics à Melbourne! Alors que nombreux étaient ceux à la voir perdre contre Linda Noskova, l'Ukrainienne (WTA 93) a maîtrisé son quart et par la même occasion la Tchèque (6-3 6-4). Ses 4 ans d’expérience supplémentaires lui ont permis d'avoir la tête un peu plus froide dans les moments chauds. Sa propension à prendre davantage de risques et à armer des coups gagnants a fait toute la différence.

SUR LES TRACES DE RADUCANU? Si cela faisait 45 ans qu'une qualifiée n'avait pas rallié le dernier carré de l'Open d'Australie, il fallait seulement remonter à 2 ans et demi pour voir un tel événement en Grand Chelem. La dernière à avoir réalisé cet exploit n'était autre qu'Emma Raducanu à l'US Open 2021. Et pas besoin de vous rappeler que la Britannique avait carrément fini par empocher le gros lot. De là à dire que Yastremska va l'imiter à Melbourne Park, il y a un pas que l'on ne franchira pas. Mais personne ne l'avait non plus fait voici 2 ans et demi pour Raducanu…

LE SOUVENIR DE ZHENG... Parce qu'elle a su s'offrir Anna Kalinskaya, en partie grâce à sa plus grande fraîcheur physique et, partant de là, à sa lucidité, Zheng Qinwen (ou Qinwen Zheng) se rapproche un peu plus d'une performance façon Li Na, son idole, qui avait notamment triomphé à l'Open d'Australie 2014. Un cliché de l'époque est d'ailleurs ressorti, sur lequel on peut voir la jeune fille d'alors (elle avait 11 ans) prendre son pied devant le sacre de sa glorieuse aînée. Il reste aujourd'hui deux marches à franchir - de loin pas les plus simples - à la protégée de Pere Riba pour emprunter le même chemin. Elle sera favorite jeudi contre Yastremska. Son entrée garantie dans le top-10 peut-elle la transcender encore?

Arnaud Cerutti

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