Après la razzia Nadal, l'Espagne a complété une année de rêve
avec une troisième victoire en Coupe Davis en battant (3-1) une
Argentine maudite à Mar del Plata. C'est un véritable exploit
qu'ont réussi les Espagnols, décidément inspirés en année olympique
puisqu'ils avaient déjà gagné le Saladier d'argent en 2000 et
2004.
Les remplaçants cartonnent
Ils récidivent au moment où on l'attendait le moins, avec un n°1
mondial, Rafael Nadal, blessé et en vacances à l'Ile Maurice, un
leader de substitution, David Ferrer, tellement fragile qu'il n'a
même pas joué dimanche et un n°31 mondial, Feliciano Lopez, en
guise de lieutenant. L'ensemble était a priori trop gentil pour
inquiéter des Argentins bien plus forts sur le papier, et assoiffés
de victoire chez eux. Mais, malgré un contexte hostile, les joueurs
d'Emilio Sanchez ont réussi l'impensable.
Grâce d'abord à un Feliciano Lopez en lévitation qui a offert les
deux premiers points à son équipe, face à Juan Martin Del Potro
vendredi et dans le double samedi. Il a été relayé dimanche par son
partenaire de double, Fernando Verdasco, qui a remplacé au pied
levé un Ferrer cafardeux, pour convertir la première balle de titre
face à un autre remplaçant, José Acasuso, monté sur le ring à la
place de Del Potro, au bout du rouleau.
Verdasco au bout des cinq manches
Vainqueur (6-3, 6-7, 4-6, 6-3,
6-1) d'un superbe bras de fer, le petit ami d'Ana Ivanovic, 16e
mondial, a surmonté une sévère crise de service dans les deuxième
et troisième sets (6 breaks concédés, 7 double-fautes) pour dominer
à la régulière Acasuso, 48e à l'ATP.
Et permettre à l'Espagne de succéder aux Etats-Unis et de devenir
la nation la plus titrée de ce siècle devant la Russie. Cette
victoire, la première à l'extérieur, constitue la cerise sur le
gâteau de "l'annus mirabilis" du tennis espagnol et du sport ibère
en général: Euro de football, Tour de France, dix-huit médailles
aux Jeux de Pékin, et en tennis, les triomphes de Nadal à
Roland-Garros, Wimbledon et aux JO ainsi que la place de n°1
mondial. Quelle année!
La malédiction argentine
Mais aussi belle soit-elle, la victoire de l'Espagne est presque
éclipsée par la nouvelle tragédie vécue par le tennis argentin.
Depuis leur première finale perdue en 1981 aux Etats-Unis, les
Albicelestes ont joué quatre quarts, cinq demi-finales et deux
finales. Mais continuent à être la seule fédération majeure sans
Saladier d'argent dans sa vitrine.
Cette fois, toutes les conditions était pourtant réunies: deux
joueurs de simple performants, tout un pays derrière elle, et un
adversaire amoindri. Mais ces supposés avantages se sont
transformés en handicaps au fil d'un week-end cauchemardesque. Del
Potro, pourtant auréolé de son statut de top-10, a surtout montré
tous les efforts fournis pour arriver à ces hauteurs.
Une pression trop forte
Complètement fourbu, il a cédé physiquement vendredi, et laissé
sa place dimanche. Un flop. Nalbandian a pour sa part déçu en tant
que leader historique, en passant à côté de son double. Quant à la
passion du public, énorme, elle s'est transformée en pression
insoutenable, visible sur des bourdes parfois monumentales. Et ce
n'est surtout pas un hasard si l'Espagne a gagné quatre des cinq
tie-breaks ce week-end.
Enfin, l'absence de Nadal a visiblement galvanisé les Espagnols,
confortablement tapis dans leur position d'outsiders et surmotivés
à l'idée de faire taire tous ceux qui les condamnaient à
l'échaffaud. Verdasco et surtout Lopez ont montré qu'ils avaient la
"grinta" en plus de leur talent. Leur carrière pourrait en prendre
un tour nouveau. Depuis son matelas pneumatique flottant sur
l'océan Indien, Rafael Nadal a dû apprécier.
afp/mor
Les 10 derniers vainqueurs
2008: Espagne-Argentine 3-1
2007: Etats-Unis-Russie 4-1
2006: Russie-Argentine 3-2
2005: Croatie-Slovaquie 3-2
2004: Espagne-Etats-Unis 3-2
2003: Australie-Espagne 3-1
2002: Russie-France 3-2
2001: France-Australie 3-2
2000: Espagne-Australie 3-1
1999: Australie-France 3-2
Finale de la Coupe Davis
Argentine - Espagne 1 - 3
Nalbandian - Ferrer
6-3 6-2 6-3
Del Potro - Lopez
6-4 6-7 6-7 3-6
Calleri/Nalbandian -
Lopez/Verdasco
7-5 5-7 6-7 3-6
Acasuso - Verdasco
3-6 7-6 6-4 3-6 1-6
Réaction de Nadal (interrogé à Majorque par la télévision espagnole): "On ne peut pas être plus heureux, c'est un moment inoubliable, ils ont fait l'histoire. Ce qu'ils ont réussi est impressionnant dans une atmosphère difficile. Fernando (Verdasco) a été brillant et génial à partir du 4e set. Feliciano (Lopez) a été très grand. Emilio (Sanchez, le capitaine espagnol) a su former un groupe au sein duquel il y a une ambiance phénoménale".