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Federer, "c'est un incroyable accomplissement"

Federer écrit l'Histoire et tous les journaux racontent l'exploit.
Roger Federer peut enfin embrasser la Coupe des Mousquetaires.
Quelques heures après sa victoire historique en finale de Roland-Garros, le Bâlois livre ses impressions et revient sur cette quinzaine haute en couleurs et riche en surprises. Interview.





Roger Federer a qualifié de "magique" sa première victoire à
Roland-Garros dimanche. Ce succès permet au Bâlois d'entrer
doublement dans la légende, en réussissant un Grand Chelem de
carrière sur quatre surfaces différentes, tout en égalant le record
de Pete Sampras avec ce 14e trophée majeur. "Je vais mettre du
temps à réaliser. C'est incroyable de réussir ces deux choses dans
le même temps".

"J'ai atteint plus que je n'aurais jamais imaginé"

Que ressentez-vous après cette première victoire à
Paris?




ROGER FEDERER: C'est un incroyable
accomplissement. Je suis très fier de ma carrière. J'ai atteint
plus que je n'aurais jamais imaginé. Mon rêve de gosse était de
gagner Wimbledon une fois. Alors gagner quatorze titres du Grand
Chelem... c'est un sentiment incroyable. Le faire ici à Paris,
c'est magique. C'est un record énorme.



Etes-vous le meilleur joueur de l'histoire?



ROGER FEDERER: Je ne sais pas si on saura
vraiment un jour. J'ai toujours pensé que c'était sympa de faire
partie des meilleurs. Je suis déjà content d'être parmi eux.
J'essaie de faire la meilleure carrière possible. On fera les
bilans à la fin. J'espère garder mes records et en battre d'autres.
Mais en définitive, ce n'est pas à moi de décider qui est le
meilleur et qui ne l'est pas. Je serai en paix quand ma carrière
prendra fin, mais j'aime trop le tennis. Il me reste encore
beaucoup à faire : l'or en simple aux Jeux olympiques, la Coupe
Davis, et X Wimbledon !



Avez-vous eu des signes comme quoi cette année était la
bonne?




ROGER FEDERER: Oui. La façon avec laquelle j'ai
gagné contre Acasuso et Haas m'a donné un sentiment que rien ne
pourrait m'arriver. J'ai eu des situations terribles à affronter. A
plusieurs reprises, je suis passé tellement près de la défaite, un
peu comme Agassi il y a dix ans. Mais il faut avoir la chance de
son côté pour conquérir un titre. Tout est venu au bon moment. Les
choses ont tourné en ma faveur. Bon, si je m'étais cassé une jambe
en finale, cela aurait signifié que cela n'était pas la bonne année
pour moi !

"Les gens avaient tellement envie que je gagne"

La défaite de
Nadal a-t-elle été déterminante
?



ROGER FEDERER:

Je savais que j'aurais plus de
chances que les années précédentes vu mon bilan contre lui. Mais en
même temps, cela a augmenté la pression sur moi. Elle était
extrême, les gens avaient tellement envie que je gagne. J'ai
l'impression d'avoir disputé quatre finales dans mes quatre
derniers matches. Je suis très fatigué.



Avez-vous songé un moment ne jamais y arriver?



ROGER FEDERER:

J'étais à la fois si proche du
titre, et si loin dans mes trois finales perdues face à Rafael
Nadal les trois dernières années. Rafa était le plus fort sur terre
battue. Il était encore le grand favori cette année mais je savais
qu'il ne pouvait pas être toujours en finale et que je ne
laisserais pas échapper l'occasion. Et même si je l'avais retrouvé
en finale, j'y aurais cru. Jusqu'à la fin de ma carrière, j'y
aurais cru. Je suis un trop bon joueur de tennis pour ne pas y
croire.



Le fait d'avoir dû attendre si longtemps avant de gagner ici
offre une saveur particulière
?



ROGER FEDERER:

Absolument, la satisfaction est
encore plus grande, surtout après avoir été si près ces dernières
années. La défaite la plus difficile à encaisser fut celle de 2006:
je me demandais alors si je pourrais à nouveau jouer une finale, et
me disais que ce serait long de devoir attendre une année pour
tenter à nouveau ma chance. Quand tu es petit, tu apprends que tu
ne peux pas tout avoir dans la vie. Mais j'ai toujours été prêt à
remettre l'ouvrage sur le métier.

"On a oublié un peu rapidement que j'avais eu une
mononucléose"

Cette victoire vient après plusieurs mois
difficiles...




ROGER FEDERER: On a dit beaucoup de choses. Que
j'étais sur le déclin, etc... C'était un peu justifié dans le sens
où j'ai perdu ma place de N.1 mondial. Mais je ne suis pas sorti du
Top 10 ou du Top 100 non plus. J'ai continué à avoir de bons
résultats en Grand Chelem. On a oublié un peu que j'avais eu une
mononucléose l'année dernière. On ne m'a pas laissé le temps de
revenir.



Vous attendiez-vous à une finale plus serrée?



ROGER FEDERER: Je m'attendais à un match
compliqué. J'espérais un bon départ, je l'ai eu. Cela m'a permis de
me relâcher. Le deuxième set a été capital. J'ai joué un des plus
grands tie-breaks de ma vie avec quatre aces. Mais c'était
difficile sur un plan émotionnel.



Surtout sur la fin?



ROGER FEDERER: Je pensais sans arrêt: et si je
gagne le tournoi? Qu'est-ce que cela signifierait? Que dire si je
gagne? J'étais très nerveux au début du troisième set quand j'ai
réalisé à quel point j'étais près. Je n'arrivais plus à réfléchir
normalement. Au changement de côté du dernier jeu, je pensais que
je serais assis cinq minutes plus tard sur cette même chaise en
tant que vainqueur. J'espérais qu'il manque quatre retours, mais
cela ne se passe jamais comme cela. J'ai su rester agressif et
intelligent concernant mes choix tactiques. Je ne me voyais pas
gagner, mais était ravi de la situation qui était la mienne. Je
n'avais pas peur, car les meilleurs doivent toujours servir pour le
match. C'était terrible.



agences/rsch

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La parole à Robin Soderling

C'était sympa de participer à ce moment d'histoire, je m'en souviendrai toute ma vie. Pour moi c'est le plus grand, j'ai toujours aimé jouer contre lui, même si je perds toujours. D'ailleurs, le match s'est déroulé comme je l'imaginais. Je l'ai déjà joué tellement souvent que je connais son jeu par coeur. Et c'est encore la même histoire: son jeu ne me convient pas, je n'arrive pas à être agressif contre lui. Contre Rafa (Nadal), j'arrive à faire le jeu, à dicter les échanges. Mais Roger m'empêche de le faire.

Au début, je sortais de nos matches en me disant que j'avais très mal joué. Aujourd'hui, je sais que c'est lui qui me fait jouer aussi mal. Il n'a aucune faiblesse, Il mérite d'être le meilleur de tous les temps. Ma mauvaise réputation ? Je ne pense pas être quelqu'un de méchant. Ce que vous avez vu pendant cette quinzaine, c'est l'homme que je suis vraiment.

Le Roi est mort, vive le Prince

Franchement, que celui qui croyait vraiment que Federer pouvait remporter Roland-Garros lève sa raquette maintenant. Certes, il avait battu Nadal en finale à Madrid. Mais tous, joueurs en tête, reconnaissaient que les conditions de jeu y étaient particulières. En 2007, à Hambourg, Federer avait aussi battu Nadal en finale. Quelques semaines plus tard, le Majorquin gagnait pourtant en 4 sets à Paris. Donc... Mais voilà, le Roi "Rafa" a été shooté hors de son soi-disant inébranlable trône par le trublion Soderling, et les cartes redistribuées. Le Roi est mort, vive le Prince. Federer, tout désigné.

Et c'est là peut-être que le triomphe de Federer est le plus magistral. Promu favori no1, le joueur à la confiance ébranlée a été livré à une meute de jeunes loups affamés, tous alléchés à l'idée d'empêcher Federer "de le faire". Mais là où tout le monde le voyait chuter, définitivement peut-être, lui a fait front, bravant toutes les tempêtes avec toujours le même discours: "je peux le faire, pas besoin de coach,...". Et il avait raison, le bougre. Il a gagné Roland-Garros, la tour qui semblait imprenable. Et, sur la Coupe des Mousquetaires figurera toujours son nom. Et pas "Rafael Nadal a été sorti en 1/8".

Federer inscrit désormais son nom dans la légende. Aux côtés des Agassi, Perry, Budge, Laver et Emerson, tous lauréats des 4 Grands Chelems. Et, signe du destin, c'est le "Kid", lui aussi vainqueur à la Porte d'Auteuil à sa 11e tentative, qui lui a remis le trophée. Mais la légende, "Rodgeur" l'intégrera définitivement en gagnant à Wimbledon, son jardin piétiné par Nadal sous ses yeux en 2008. Avec 15 titres, il reléguerait Sampras (14) aux oubliettes. Et Federer, homme au palmarès inégalé et certainement inégalable, pourra ainsi désormais se consacrer à la Coupe Davis. Toute une nation en rêve.

Commentaire de Daniel Burkhalter