Yannick Noah, ex-tennisman et désormais chanteur, s'est prononcé en faveur de la légalisation du dopage dans le sport, samedi, dans une chronique publiée par le quotidien Le Monde, afin que "tout le monde ait la potion magique" qu'il accuse les sportifs espagnols d'utiliser.
"Arrêtons l'hypocrisie. Il faut bien sûr respecter la présomption d'innocence, mais plus personne n'est dupe. La meilleure attitude à adopter est d'accepter le dopage. Et tout le monde aura la potion magique", affirme Noah, personnalité préférée des Français selon le dernier classement réalisé par l'Ifop pour le Journal du Dimanche.
S'interrogeant sur la domination des sportifs espagnols "sur les terrains de foot, les parquets de basket ou les routes du Tour de France", Yannick Noah se demande s'ils "auraient découvert des techniques et des structures d'entraînement avant-gardistes que personne avant eux n'avait imaginées".
"Difficile de gagner sans potion magique"
"J'ai beaucoup de mal à croire à cette hypothèse", répond le vainqueur de Roland-Garros en 1983, selon qui "aujourd'hui le sport c'est un peu comme Astérix aux jeux Olympiques: si tu n'as pas la potion magique, c'est difficile de gagner".
"Et là, on a l'impression que, comme Obélix, (les sportifs espagnols) sont tombés dans la marmite", accuse Yannick Noah: "Mais ces dernières années, ils ont dû un peu forcer sur la potion vu l'hécatombe de contrôle positifs", poursuit l'ancien tennisman, sans donner le moindre nom.
Et le chanteur de regretter "la schizophrénie bien française" qui fait que nous voudrions des champions mais que nous sommes "sans pitié dès qu'il y en a un qui se fait prendre".
Douillet: le sport français consterné par les propos de Noah
Plus tard dans la journée, sur le plateau du 20h00 de la chaîne de télévision France 2, c'est le ministre des Sports, David Douillet, qui vient s'exprimer sur le sujet: "Il faut amener des preuves quand on affirme quelque chose", insiste le ministre, selon qui "le sport français est consterné par les propos de M. Noah".
"Ce sont des propos graves et irresponsables", insiste le double champion olympique et quadruple champion du monde de judo, estimant être "la preuve vivante qu'on peut gagner sans se doper".
"C'est pourquoi je veux instituer, et rapidement, un délit pénal pour ceux qui se dopent, à la fois pour protéger les sportifs propres et pour permettre aux enquêteurs d'aller plus loin", a poursuivi le ministre, soulignant suivre ici "la préconisation des athlètes membres du Comité international olympique".
Une certitude: les déclarations de Yannick Noah tombaient au plus mal pour le ministre, qui défendait samedi à Paris la candidature de la France pour le Championnat d'Europe de basket 2015. Une réunion lors de laquelle il a croisé M. Saez, président de la Fédération espagnole de basket. Le ministre a tenu à "lui présenter ses excuses au nom de la France et du gouvernement", a précisé à l'AFP sa conseillère en communication.
agences/bond
Comité espagnol: "Noah est un ignorant"
Le président du Comité olympique espagnol Alejandro Blanco a qualifié samedi Yannick Noah d'"ignorant" sur le site web du quotidien "Marca", après que l'ancien joueur de tennis français eut expliqué les récents succès du sport espagnol par le recours au dopage.
"Il est très difficile pour des ignorants de comprendre le boom du sport espagnol. C'est le travail qui a été la clé du succès", affirme le président du Comité olympique espagnol, très remonté, dans l'édition internet de Marca. Blanco précise que "les 11.200 contrôles antidopage réalisés chaque année par l'Espagne sont la meilleure réponse que l'on puisse donner".
Ministre français des sports, David Douillet s'est aussi insurgé contre les affirmations de Noah. "Ce sont des propos graves et irresponsables", a accusé l'ancien judoka, insistant sur le fait qu'"il faut amener des preuves quand on affirme quelque chose".
"Le sport français est consterné par les propos de M. Noah", a ajouté David Douillet, déclarant avoir "reçu énormément de coups de fil d'athlètes qui ne se reconnaissent pas dans ces propos-là".
"Je suis la preuve vivante qu'on peut gagner sans se doper", a affirmé le ministre, double champion olympique de judo chez les lourds en 1996 et 2000 et quadruple champion du monde, précisant vouloir "instituer, et rapidement, un délit pénal pour ceux qui se dopent, à la fois pour protéger les sportifs propres et pour permettre aux enquêteurs d'aller plus loin".
De son côté, le quotidien sportif AS citait samedi des sources du Conseil Supérieur du Sport (CSD), le ministère des Sports espagnol, selon lesquelles "internationalement, il est reconnu que l'Espagne est à la pointe de la législation antidopage".
"En Espagne, il n'y a pas plus ou moins de dopage que dans d'autres pays", expliquent ces mêmes sources du CSD. Enfin, AS cite aussi le président de la Fédération espagnole de basket-ball, José Luis Saez, qui qualifie Noah d'"irresponsable" et de "jaloux".
"Dans des questions aussi sensibles que le dopage, on ne peut pas accuser sans preuves, il faut démontrer les choses, sans semer au vent des doutes inutiles", insiste Saez.
L'ancien vainqueur de Roland-Garros 1983 accuse également les autorités espagnoles de fermer les yeux sur le dopage de certains de leurs sportifs. "En Espagne, l'affaire Fuentes, le plus gros scandale de dopage de l'histoire a fait +pschitt+. (...) Peut-être parce que là-bas le sport occupe une place tellement importante que ses héros y sont plus protégés qu'ailleurs".
Eufemiano Fuentes, le médecin au coeur d'un réseau de dopage sanguin démantelé en 2006 par l'opération Puerto, attend encore aujourd'hui d'être jugé.