Tout roule pour Alinghi. En tout cas en ce qui concerne l'aspect
sportif de la 33e Coupe de l'America. Les résultats des premiers
essais effectués sur le Léman ont dépassé les espérances du team
helvétique.
Port d'attache du nouveau catamaran géant «Alinghi 5», Le Bouveret
(VS) accueillait jeudi matin une conférence de presse destinée à
présenter officiellement le prototype. En l'absence du skipper Brad
Butterworth, retenu dans les couloirs des tribunaux new-yorkais,
Murray Jones a endossé la responsabilité des premiers bords du
bolide sur le Léman.
«Nous sommes en avance sur notre programme de tests,
expliquait le stratège néo-zélandais de 51 ans. La fibre
optique intégrée aux différentes pièces nous permet de savoir
exactement quelles sont les forces exercées sur la structure, ceci
en temps réel! C'est un outil de développement absolument
incroyable. Pour une sortie initiale, le bateau est étonnamment
facile à manoeuvrer, élégant, souple, confortable».
Soigner les détails
«C'est le bateau le plus
exceptionnel sur lequel j'ai navigué, enchaînait Murray Jones.
La sensation de puissance est véritablement extraordinaire. La
vitesse est telle que l'on se sent déjà un peu à l'étroit sur le
lac, la Méditerranée nous offrira plus de possibilités.»
L'équipe continuera de naviguer sur le Léman encore une semaine.
Début août, l'oiseau de carbone sera héliporté dans le port de
Gênes (It), par dessus les Alpes.
Murray Jones le sait, la Coupe peut se jouer pour une question de
secondes. «Tout doit être très précis, ajoutait le Kiwi.
Nous allons maintenant nous atteler, lors des prochaines
sorties sur le lac puis en mer, à exercer les réglages afin de
trouver la meilleure configuration possible pour la course. Nous
devons ainsi valider l'immense travail qui a été accompli en un
temps record par les équipes du design et de la
construction».
Compromis
De son côté, l'Américain Grant Simmer, coordinateur du team de
designer a rappelé qu'au moment de donner les premières impulsions
au projet en décembre 2007, son équipe avait dû trouver un
compromis entre un bateau radicalement novateur et la possibilité
de le construire à temps. Sans aucun doute, cette équation a été
résolue avec la naissance d'»Alinghi 5». L'exploit prend d'autant
plus de valeur que les ingénieurs d'Alinghi partaient cette fois
de
zéro.
Yves Detrey: « Avant tout une question de feeling»
A seulement 29 ans, Yves Detrey peut déjà se targuer d'une
solide expérience dans le monde de la voile. Triple vainqueur du
Bol d'Or sur le lac qui l'a vu grandir, le navigateur de Clarens
(VD) compte déjà à son palmarès deux victoires dans la Coupe de
l'America, décrochées en 2003 et 2007 au sein du Team Alinghi.
Quasiment à la maison, le Vaudois apprécie les moments passés à
apprivoiser l'immense catamaran et rêve d'une troisième victoire
dans la «Cup».
Si: Quel est votre sentiment à la vue de ce
catamaran amarré au port du Bouveret?
Yves Detrey: C'est très spécial pour moi. Je
n'aurais jamais pensé qu'un jour je naviguerais, juste devant chez
moi, sur le bateau qui défendra la Coupe de l'America quelques mois
plus tard.
Si: Le passage d'un monocoque à un multicoque
géant ne vous a pas trop perturbé ?
Yves Detrey J'ai déjà pas mal d'expérience en
multi. J'ai participé au développement de ce nouveau bolide sur
«Alinghi 41», le bateau d'Ernesto Bertarelli construit en 1999 pour
le Bol d'Or 2000. J'occupais déjà un poste à responsabilités.
Ensuite, je peux également puiser dans les expériences acquises
lors des trois saisons effectuées sur les D35.
Si: Quels aspects de la navigation sur D35
peut-on appliquer sur un engin tel qu'»Alinghi 5» ?
Yves Detrey C'est avant tout une question de
feeling. Le principal reste de savoir comment se comporte un
multicoque. C'est ce feeling là qu'on doit prendre avec. Les
dimensions sont évidemment autres, l'inertie également, mais la
manière de naviguer reste fondamentalement la même.
si/ag
La plaisanterie de Beltarelli
«Nous devrions peut-être remercier Oracle après tout. C'est grâce à leurs plaintes en justice que nous avons eu la chance de pouvoir développer un tel bateau!» Ernesto Bertarelli, le boss du Team Alinghi a rapidement mis tout le monde à l'aise lors de la conférence de presse organisée jeudi matin au Bouveret.
«Cette campagne sera effectivement la plus chère des trois, mais je ne regrette pas un seul instant d'avoir posé cet argent sur la table», a enchaîné le père du projet suisse, déjà double vainqueur de l'Aiguière d'argent. Le Genevois a encore souligné que le Deed of Gift, document fondateur de l'épreuve, laissait beaucoup de libertés en ce qui concerne le bateau en lui-même. «Nous avons la possibilité d'utiliser un moteur pour gérer toutes les fonctions hydrauliques, des trapèzes ou des ballasts».
Par contre, pas un mot n'a été dit sur l'emplacement du match qui devrait se dérouler en février 2010. Il ne sera rendu public que le 6 août. La décision à l'interne est déjà tombée, ce qui signifie que les tests effectués durant la semaine à venir n'auront plus aucun impact en ce qui concerne le choix du plan d'eau pour le duel.